Tropiques Criminels : Béatrice de La Boulaye, « C’est une série plus féminine que féministe » (INTERVIEW)
Publié le Mise à jour le Par Alexia Malige
Diffusée sur France 2 depuis le 19 février, la saison 2 de Tropiques Criminels propose de nouvelles enquêtes en Martinique, avec toujours plus de suspense et d’humour. L’occasion pour Serieously d’échanger avec Béatrice de La Boulaye, l’une des actrices principales de la série.
Capitaine de police impulsive et décalée, Gaëlle Crivelli (Béatrice de La Boulaye) reprend du service dans la saison 2 de Tropiques Criminels, aux côtés de sa Commandate, Mélissa Sainte-Rose (Sonia Rolland). Si la saison 1 marquait le début de leur collaboration explosive, ces nouveaux épisodes leur permettent de mettre leurs différences de côté pour nouer de solides liens d’amitié. Un changement de dynamique, qui offre un peu moins de conflits, pour beaucoup plus d’émotions.
Qu’est-ce qui vous a intéressée dans ce projet de saison 2 ?
Ce qui est génial, c’est de pouvoir faire évoluer son personnage. Avec la saison 2, on est plus à l’aise, parce qu’on a posé ses marques. On a fait une première année où l’on ne savait pas trop où l’on allait, mais on l’a fait avec tout notre cœur et notre conviction. Ça a été montré au public et les spectateurs ont aimé. Quand on revient pour les nouveaux épisodes, on est donc content parce qu’on sait qu’on est attendu et qu’il y a de la bienveillance autour de notre équipe et de notre travail. On y retourne avec l’envie de recommencer, puis de faire différemment, de faire mieux, de faire évoluer. C’est génial. On écrit le début d’une histoire et on ne sait pas quand elle va s’arrêter. C’est fantastique !
Vous reprenez donc votre rôle de Gaëlle Crivelli, est-ce que ce personnage vous avait manqué ?
Ah ! (rires) Oui, un peu. C’est un personnage très fort, qui respire tellement la liberté, le sans-filtre, qu’elle est très agréable à jouer et je suis contente de la retrouver. Elle me donne toujours des leçons de franc-parler, qui me servent ensuite dans ma vie.
Quelle évolution le personnage a-t-il subi entre les deux saisons de Tropiques Criminels ?
Ce qui était intéressant, c’était que sur la première saison, elle était très en place. Ça faisait 10 ou 15 ans qu’elle bossait dans cette brigade, où elle avait ses repères et Mélissa Sainte-Rose, en arrivant, est venue bousculer son quotidien. Ça ne lui a plu qu’à moitié, elle était poil-à-gratter, enfin vraiment tête-à-claque et impulsive. Elle était comme une enfant qui n’en fait qu’à sa tête, à fleur de peau, instinctive. Puis, à la fin de la saison 1, elle a subi un choc psychologique. Elle a perdu son amoureux, qu’elle a elle-même envoyé en prison car il était coupable d’un meurtre. Elle a perdu son job, elle a vécu un passage à vide et est partie passer cinq mois en mer. Donc c’était intéressant de revenir dans la saison 2 avec un personnage qui a traversé une épreuve, une solitude. Lorsqu’elle revient, elle n’a plus tellement sa place. Elle a un peu muri, elle a un peu changé. Elle est toujours aussi impulsive, instinctive et insolente, mais avec un petit soupçon de vulnérabilité en plus, de sensibilité avouée, je pense. Elle est peut-être un peu plus honnête avec ses sentiments dans la saison 2.
Vous retrouvez-vous un peu dans ce personnage ?
Je pense qu’on s’entend très bien ! (rires) Quand j’ai lu le scénario, j’ai vu que c’était pour moi. Je me retrouvais dans tout. Dans la vie, j’ai toujours fait ce que je voulais. Je suis très autonome depuis longtemps. On partage beaucoup ces valeurs de liberté, d’autonomie, de franc-parler, d’honnêteté. Après, je suis peut-être un peu plus mesurée, adulte et responsable qu’elle. Mais justement, c’est extrêmement rafraichissant de ne pas l’être quand je joue Crivelli. Donc oui, on se ressemble pas mal. J’aurais pu devenir comme elle en faisant d’autres choix. En prenant un autre chemin, ça aurait totalement pu être moi, oui.
Dans la saison 2 de Tropiques Criminels, vous avez un nouveau partenaire de jeu, à savoir Arié Elmaleh. Comment s’est passée la rencontre avec lui ?
Très bien ! Arié est un comédien qui est très généreux dans le jeu. On avait vraiment envie de travailler ensemble, donc on s’est donné les moyens d’y prendre plaisir, d’être dans l’échange, dans la complicité. C’est une vraie bonne rencontre de partenaire de jeu, et puis d’amitié aussi. C’est rare de rencontrer des gens avec qui l’on est aussi complices, aussi rapidement. Et ça, c’était un super beau cadeau de la saison 2.
Quel a été le plus gros challenge pour vous sur cette saison ?
C’est de faire mieux, évidemment ! On a toujours envie de mieux faire, à tous les niveaux. On a envie d’être plus juste, plus à l’aise, de créer des émotions plus fortes. On a envie d’aller vers le haut. Ensuite, au-delà de la performance, les conditions de tournage ont été un peu compliquées. À cause du covid, on a été obligé de tourner pendant une période de l’année qui était beaucoup plus problématique, au niveau du climat, de la dengue. Comme on dit souvent, pour choisir les gens de l’équipe, il ne faut pas leur promettre les cocotiers, il faut leur dire que c’est Koh-Lanta. C’est très difficile de tourner en Martinique. Il fait chaud, le temps change, c’est difficile de garder la tête froide. Il faut être souple et prendre les choses comme elles viennent.
Tropiques Criminels aborde des thèmes de société assez forts. Y en-a-t-il un qui vous a particulièrement intéressée ?
Je félicite d’abord les auteurs, la production et la chaîne pour avoir le courage de traiter ces sujets. Ce n’est pas un décorum, la série aborde vraiment les questions. D’ailleurs, on en discute tous ensemble, car les prises de positions sont toujours un peu délicates. On travaille beaucoup, afin que ce soit le plus juste possible. Avec Sonia, on participe pas mal à ces réflexions-là et c’est hyper enrichissant. Sur cette saison, j’ai trouvé que l’avortement était un thème très sensible. C’est très courageux d’aller dans cette direction-là, qui plus est à travers le prisme de ce qu’il se passe en Martinique. Ce n’est pas tout à fait la même chose qu’en métropole et ça peut parfois faire penser à ce qu’il se passe aux États-Unis par exemple, ou dans des pays conservateurs, portés sur la religion. C’était donc très intéressant, car ça se déroule en France, mais ça rejoint des thèmes internationaux, des tendances qui commencent à poindre. C’est donc vraiment bien d’aborder ça, surtout d’une façon aussi pertinente.
La série est très féministe, est-ce important pour vous de faire passer des messages à travers la fiction ?
Je crois que c’est une série plus féminine que féministe. On a la chance d’y voir des femmes qui ont des boulots, des responsabilités et pour moi, c’est ça la norme. Je trouve ça chouette qu’on en parle aussi naturellement. Il n’y a pas tellement de revendications en fait. Après on a un chef de groupe un peu misogyne, donc quelques fois, ça nous fait bisquer. Cela dit, je pense que c’est abordé sans colère et sans rage, plutôt avec humour et dérision. On se moque un peu du fait que ça existe encore et qu’il serait peut-être temps de passer à autre chose. Je trouve que ça défend vraiment le féminisme qui est plutôt le mien, qui est qu’on avance, qu’on y va et point. Des femmes libres et responsables, pour moi, c’est ce qui est normal. Je pense que c’est plutôt en montrant ces exemples-là que l’on peut faire changer les mentalités. Mais tous les combats sont bons, on est tous différents et on est tous sensibles à différents messages.
Quels sont vos projets pour les mois à venir ?
Si tout se passe bien avec la saison 2, normalement on part pour une saison 3 de Tropiques Criminels. On attend notre top départ avec impatience ! On attend que les spectateurs nous disent si on peut repartir ou non. C’est un travail d’équipe, public inclus ! A côté de ça, j’écris actuellement une série avec Bérengère Krief et je travaille aussi sur divers projets de théâtre pour la télévision.
Alexia Malige
Journaliste - Secrétaire de rédaction