Marti Noxon : "Aujourd'hui, si on ne peut pas voir des séries quand on le souhaite on est frustré !"

Marti Noxon : « Aujourd’hui, si on ne peut pas voir des séries quand on le souhaite on est frustré ! »

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Marti Noxon est la prestigieuse présidente du Jury de Series Mania pour son crû 2019. Showrunner de légende, elle a été productrice, auteure, réalisatrice sur de nombreuses séries cultes, de Buffy à Grey’s Anatomy en passant par Glee, Mad Men, Dietland ou encore Sharp Objects. Elle a répondu aux questions de Serieously et des journalistes pendant le festival lillois, le temps d'une table ronde.

Nous allons commencer par Sharp Objects, vous avez déclaré avoir eu quelques différends avec Jean-Marc Vallée sur le tournage, à propos de l’écriture et de la réalisation notamment. Pensez-vous que cette tendance actuelle de voir des cinéastes renommés arriver sur les plateaux de séries peut mettre en danger l’écriture de séries et les spécificités de ce genre ?

Marti Noxon : Je pense que ce qui m’a pris du temps à comprendre, c’est que dans d’autres endroits, comme en Europe, le réalisateur EST le showrunner. Je crois que cela peut marcher aussi même si deux personnes se mettent à diriger le show… Nous avons réussi et je crois que c’était bon pour le travail, mais je maintiens qu’il faut toujours une entente claire !

Pensez-vous que les cinéastes apportent une valeur ajoutée aux séries ?

M.N. : Absolument. C’est encore mieux lorsqu’il y a un partenariat. Pour nous qui écrivons pour les séries depuis un certain temps et racontons des histoires sur une longue période, on peut rester un peu cloîtrés dans notre manière de voir les choses. Je pense que lorsque deux mondes se heurtent c’est bénéfique pour le travail mais il y a toujours une période d’adaptation.

Quelles sont les qualités d’un bon showrunner ?

M.N. : Je dis toujours que la chose la plus importante pour un showrunner, c’est qu’il sait quel show il est en train de faire. Ce qui veut dire qu’il comprend le ton et pourquoi il raconte l’histoire là, maintenant. Le showrunner s’assure que la voix du show ne se perde pas au beau milieu du nombre de personnes qui le font. Cela peut arriver quand vous avez des executifs, 17 personnes qui vous donnent des notes, l’interprétation des acteurs et au milieu de tous ces gens, il ne faut jamais oublier où va le show, quelle est sa voix. C’est votre boulot de dire à longueur de journée : ‘oui, non, c’est une bonne idée, mais pas pour cette série !’. Sinon tout s’écroule.

Avez-vous déjà eu besoin de vous battre sur des tournages, comme Sharp Objects ?

M.N. : Pas forcément me battre, mais j’ai travaillé avec Gillian Flynn sur l’adaptation du livre, c’est sur les femmes et sur la production vous êtes cernées par les hommes (rires) ! Jean-Marc Vallée, en revanche a cette incroyable compréhension du personnage féminin, mais j’ai déjà entendu quelqu’un sur le tournage dire : ‘mais pourquoi on raconte cette histoire ? C’est quoi le but ?’, et je me disais… Bon sang. Il a fallu beaucoup d’explications.

Vous souvenez-vous d’un conseil que vous avez pu recevoir au début de votre carrière ?

M.N. : J’ai eu la chance d’être entourée et d’avoir reçu beaucoup de conseils avisés. Je me souviens que la plus grande inspiration m’est venue de Barbara Hall, une showrunner pour laquelle je travaillais et j’étais son assistante. Elle était TRÈS honnête et disait tout ce qu’elle avait à l’esprit, j’ai absorbé tout ça. Je me disais ‘c’est pour ça qu’elle est une incroyable auteure’, elle était si honnête. Cela m’a aidée à être plus audacieuse.

Vous avez signé pour quatre ans avec Netflix. Qu’est-ce qui vous a plu avec le streaming, est-ce la fin de la télévision traditionnelle ?

M.N. : Je pense que la télévision se concentrera sur le live pour les dix prochaines années : le sport, la télé réalité, les infos… Le streaming plaît à tout le monde. Aujourd’hui, si on ne peut pas voir des séries quand on le souhaite on est frustré ! J’ai fait Dietland pour AMC et on était pas disponible en streaming pendant des mois. Vous organisez une première, vous en parlez, et pour ceux qui n’ont pas pu la voir ou qui ne pouvaient pas rattraper alors, boum, fini. Girlfriend’s Guide to divorce fonctionne par exemple très bien en streaming. J’ai déjà fait des séries qui marchent bien une fois streamées mais je ne travaillais pas directement pour ces plateformes. Donc j’ai déposé les armes (rires) !

Sur quoi travaillez-vous pour Netflix ?

M.N : C’est un projet sur les sorcières ! Je sais qu’elles sont partout… Mais je voulais vraiment le faire depuis des années et des années et j’ai découvert un ouvrage que j’adore. L’action se déroule dans le passé mais peut être adapté dans le temps, c’est très excitant. Et il y a beaucoup de fantômes aussi ! Et je travaille aussi sur un trente minutes, j’ai besoin de rire.

Netflix ne communique pas les audiences à ceux qui font les séries…

M.N. : Je sais oui, mais pour être honnête je ne regarde pas vraiment les audiences de mes shows ces dernières années. Je sais qu’elles seraient intéressantes si elles étaient plus hautes (rires). Aucune de mes séries n’ont fait un carton au moment de leur diffusion, mais elles ont fait leur bout de chemin par la suite.

Votre position de présidente de Jury à Series Mania est assez honorifique. Vous fait-elle prendre le temps de regarder votre carrière, de mettre les choses en perspective ?

Je pense que ça fait partie de la personnalité des gens qui continuent à faire le même travail que moi, vous pensez toujours au prochain projet… Évidemment, il y a beaucoup de choses que j’aurais aimé faire différemment, mais c’est difficile pour moi de m’asseoir et de dire ‘ah oui, ça ça a marché !’. Je suis plus : ‘bon, qu’est-ce que je vais faire après ?’ !

Hannah Benayoun

hannah@serieously.com

Je suis la fille spirituelle de Leslie Knope (Parks and Recreation) & Thomas Shelby (Peaky Blinders).
En ce moment, mon Snack&Chill idéal c'est Bo Bun légumes devant Friends.

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