Leurs enfants après eux : l’obsession cinéma de la semaine

Ce 4 décembre marque la sortie au cinéma de Leurs enfants après eux, film adapté du roman éponyme de Nicolas Mathieu, prix Goncourt 2018. Une chronique sentimentale se déroulant dans les années 90 dans l’Est de la France, avec en filigrane un discours social qui flamboie à travers un casting cinq étoiles, devant la caméra des frères Boukherma. Une fable poignante qui inscrit des larmes dans nos sourires et dans nos souvenirs, que l’on a adorée et que l’on veut déjà revoir.

C’est quoi Leurs enfants après eux ?

Le titre Leurs enfants après eux évoque certainement quelque chose aux lecteurs. Et pour cause, il s’agit tout simplement du prix Goncourt 2018. Roman signé Nicolas Mathieu, celui-ci est le deuxième de son auteur et s’offre en ce 4 décembre une nouvelle peau à travers une adaptation cinématographique aussi riche et léchée que son œuvre d’origine.

L’histoire, c’est celle de l’adolescence, celle des régions de France et celle des années 90. Nimbé de nostalgie, le film signé Ludovic et Zoran Boukherma – tandem fraternel qui a déjà fait jaillir son talent dans les géniaux Willy 1er et Teddy – nous plonge en effet dans une zone périurbaine de l’Est de la France, en 1992. On y rencontre Anthony, jeune ado de 14 ans qui, accompagné de son cousin, flâne. La routine et le flegme du duo vont être bouleversés par l’arrivée dans leur cadre de Stéphanie.

Le coup de foudre d’Anthony donne alors le coup de feu à la course du garçon après sa vie et son destin. Une chronique adolescente divisée en 4 chapitres (1992, 1994, 1996 et 1998) nous faisant voyager dans les méandres de son parcours et dans nos propres souvenirs.

Y’a qui au casting ?

À l’origine envisagée par Gilles Lellouche, la réalisation de Leurs enfants après eux a finalement été confiée aux frères Boukherma. L’acteur et cinéaste – qui devait se concentrer sur son film L’Amour ouf – n’a pour autant pas complètement quitté le projet, puisqu’il se dévoile dans l’un de ses rôles les plus complexes et complets, celui du père d’Anthony, Patrick Casati. Oscillant entre force, brutalité et sensibilité extrême, Lellouche impressionne et touche en plein cœur : mention spéciale à la scène du bal de 1998 dans laquelle il va forcément vous tirer une larme.

Mais si Gilles Lellouche brille, il ne fait pourtant pas d’ombre à Paul Kircher qui, après sa révélation dans Le Règne animal souligne à nouveau son talent et sa grande maturité sous les traits d’un Anthony plus crédible que jamais. Le comédien de 22 ans a même remporté le Prix Marcello-Mastroianni, à la Mostra de Venise, pour son interprétation du jeune héros.

Il donne la réplique à Angelina Woreth, douce, lumineuse et affirmée en Stéphanie Chaussoy, Sayyid El Alami (Oussekine) sous le costume de la tête brûlée et ennemi de la bande Hacine, ou encore Ludivine Sagnier qui nous montre une fois encore l’étendue de sa palette de jeu en Hélène, la maman d’Anthony. Le tout sans oublier Louis Memmi qui, après ses exploits dans le film Borgo, crève à nouveau l’écran dans le rôle du cousin d’Anthony. Les fans de Raphaël Quenard apprécieront aussi très certainement l’apparition de l’acteur au cours du film.

C’est un peu comme… L’Amour ouf et Le Premier jour du reste de ta vie

Alors, oui, ne pas comparer Leurs enfants après eux à L’Amour ouf aurait été compliqué, puisqu’au-delà de Gilles Lellouche qui aurait dû réaliser l’un et a signé l’autre, et leur date de sortie rapprochée, les deux longs métrages ont pour point commun leur thématique. Chacun des films aborde en effet une chronique amoureuse adolescente se déroulant dans les années 90. On y retrouve aussi des influences musicales semblables, et le sujet complexe du déterminisme social et la possibilité ou non de s’en extraire.

La comparaison s’arrête pourtant là. Quand le premier dépeint l’amour à travers le prisme de la violence, en enchaînant, multipliant, nous abreuvant en références cinématographiques et idées de mises en scènes; l’autre tient son discours de bout en bout dans une réalisation maîtrisée, léchée, affirmée et équilibrée. Les fans de Xavier Dolan apprécieront le travail et le regard porté par les frères Boukherma pour narrer avec délicatesse et goût l’épopée d’Anthony et des autres, dans Leurs enfants après eux.

Une chronique qui avance dans le temps, et répartie en plusieurs chapitres formant des années, à la manière du très réussi Le Premier Jour du reste de ta vie. Comme dans le film de Rémi Bezançon sorti en 2008, on est emporté dès les premières secondes dans l’histoire et le quotidien des personnages qui se dévoilent au fur et à mesure à travers l’écran. On les suit dans des passages de leur vie qui ne sont pas sans rappeler certains passages de la nôtre, et qui donnent à la nostalgie ce goût doux qui inscrit des sourires dans nos larmes, et inversement.

Le détail qui change tout : le regard de Nicolas Mathieu

Si les tubes du film ont cette petite chose en plus qui va vous faire battre le cœur et vous remémorer certaines scènes de famille, le détail de Leurs enfants après eux qui change tout est certainement le regard que porte Nicolas Mathieu sur ce projet. Le romancier qui n’était pas sûr de vouloir que son livre soit adapté a finalement accepté après des discussions avec Gilles Lellouche, puis a encore dit « oui » lorsque ce dernier a soufflé le nom des frères Boukherma pour donner vie à ses pages.

« J’ai vu leur film Teddy dans lequel il y avait plein de choses qui coïncidaient bien avec ce qu’il y avait dans le roman, des choses qui m’ont donné confiance. Et puis le roman est né en partie de Bruce Springsteen et notamment de la chanson The River, alors quand j’ai vu qu’un des deux frères avait un tatoo Born To Run derrière l’oreille, ça m’a semblé de bon augure« , a confié Nicolas Mathieu chez Franceinfo.

« Je voulais que ce soit du cinémascope. Je voulais que ce soit large, qu’il y ait de la vitesse, de la jouissance… Pour le reste, l’idée, c’était qu’ils fassent leur film. Je venais d’avoir le Goncourt, il fallait que j’écrive un autre roman. C’était ça ma hantise à ce moment-là. Donc, je n’ai pas du tout participé à la rédaction du scénario. Mais ils étaient très sympas, on se passait des coups de fil, ils me racontaient (… ) Mon seul souhait, c’était que le film soit bon. Il s’avère finalement que le film est très fidèle au livre.« 

Que vous ayez lu ou non Leurs enfants après eux, vous ne regretterez pas de courir en salle pour aller voir le film adapté du roman, dès ce 4 décembre au cinéma.