Le Menu : un thriller saignant et savoureux servi par Ralph Fiennes
Publié le Par Alexia Malige
Expérience sensorielle et cinématographique, Le Menu de Mark Mylod est un délicieux mélange de mystère et de tension, légèrement saupoudré d’épouvante. Une recette originale et épicée, qui a de quoi surprendre, mais également combler l’appétit des spectateurs friands de frissons.
Avis aux gourmets, Mark Mylord met les petits plats dans les grands pour proposer un film gastronomique étonnant, où saveur rime avec horreur. A la carte, on retrouve donc la crème de la société, conviée à une soirée de dégustation mémorable dans le restaurant sélect et isolé du célèbre chef Slowik. Loin d’être blancs comme neige, ces invités triés sur le volet vont vite dévoiler les casseroles qu’ils trainent derrière eux avant que le repas ne tourne définitivement au vinaigre. En d’autres termes, c’est une réception des plus alléchantes que le cinéaste britannique propose à son public.
Une présentation exquise et raffinée
Etablissement étoilé oblige, le réalisateur a mis les bouchées doubles en terme d’image et de mise en scène. Avec son directeur de la photographie Peter Deming (Scream 3 et 4, La cabane dans les bois), Mark Mylod a attaché une importance particulière à l’esthétique de son film et réussit alors le pari d’offrir un long-métrage aussi soigné qu’une assiette de grand chef. Chaque plan a été calibré, pesé et millimétré pour nourrir une ambiance froide, menaçante et quasi-clinique, où Ralph Fiennes ne se contente pas de cuisiner, mais opère ses aliments tel un chirurgien obsessionnel.
Les chapitres, ou plutôt les plats qui se succèdent, apparaissent toujours plus tranchants que les précédents, plus salés, mais également plus terrifiants. Le tout relevé par la musique grinçante de Colin Stetson (Hérédité), dont les notes piquantes agissent comme un vent glacial sur une peau nue. Tout a ainsi été préparé avec précision pour donner l’eau à la bouche aux spectateurs avides de surprises et de sueurs froides.
L’angoisse pour plat de résistance
Avec son label thriller, Le Menu se devait d’apporter une bonne dose de stress et de tourment à son public. Mark Mylod n’y va donc pas avec le dos de la cuiller et en donne suffisamment pour que chacun ait de la matière à se mettre sous la dent. Dans ce milieu aseptisé où les lames dansent au milieu des langues empoisonnées, il n’en fallait pas beaucoup pour construire une atmosphère oppressante et malsaine. Les petits secrets des convives font donc office d’amuse-gueules, quand leurs défauts, leurs démons et leurs peurs constituent la suite de ce repas mortifère. Et c’est finalement leur petite tambouille du quotidien que ces gourmets de pacotilles se voient servir avec cynisme et horreur, les ramenant à leur réalité noire et effrayante.
Un casting aux petits oignons
Porté par un Ralph Fiennes sinistre et venimeux, la distribution du film brille par ses nombreuses étoiles hollywoodiennes. Anya Taylor-Joy (Le Jeu de la Dame) et Nicholas Hoult (The Great) forment notamment un duo détonnant, dans lequel la fraîcheur de l’une contraste avec la passion de l’autre. Judith Light (Madame est servie), John Leguizamo (Violent Night), Hong Chau (Big Little Lies) ou encore Janet McTeer (Ozark) viennent ensuite compléter ce tableau hétéroclite et fascinant.
Renforcé par des interprétations « aux poêles », Le Menu déroule donc avec naturel son intrigue morbide et cauchemardesque, s’enfermant parfois dans un excès de mise en scène et d’artifices au détriment du scénario. Certains points de l’histoire trop Al dente auraient ainsi mérité un peu plus de cuisson, afin de gagner en consistance et éviter de nous laisser sur notre faim. Toutefois, cette formule entrée, plat, dessert ne manque ni de style ni d’audace et parvient à allier délicatesse et hémoglobine pour un résultat divinement saignant. Ne reste qu’une chose à dire : bon film et surtout, bon appétit !
Découvrez Le Menu au cinéma dès ce mercredi 23 novembre.
Alexia Malige
Journaliste - Secrétaire de rédaction